L’idée de cette rando vient de la lecture de son itinéraire sur TheHikingLife. Découvrir la nature préservée de l’île, jusqu’à sa pointe la plus septentrionale, à notre rythme et loin des convois de tours organisés, voici une idée séduisante. Le kilométrage annoncé est dans nos moyens, et il n’y a pas de difficulté particulière.
Avant de quitter Khoujir, nous essayons une dernière fois de trouver une carte détaillée de l’île avec une trace des sentiers et idéalement les dénivelés mais c’est peine perdue, il y a rupture nous dit-on. Nous nous reposerons sur l’application MapsMe de notre tablette qui utilise le signal GPS pour nous localiser sur des cartes OpenStreetMap (OSM), téléchargeables et donc utilisables hors ligne.
Après avoir laissé à notre logeuse un petit sac contenant le peu d’équipement superflu que nous ne voulons pas traîner sur 38 kilomètres, nous nous mettons en route gaiement (le départ d’un trek est toujours un moment d’exaltation). Le temps est magnifique.
La randonnée commence à partir de la plage juste derrière Nikita’s.
Nous nous arrêtons admirer le Rocher du chaman et Charlotte accroche un ruban acheté la veille. Avec toutes ces couleurs et les rubans qui volent au vent, l’endroit est vraiment magique.
L’île est un haut lieu du chamanisme, et nous verrons à différents points ces rubans accrochés tantôt aux arbres tantôt sur des totems en bois.
Il faut ensuite longer la plage vers le nord.
Nous suivons l’eau au plus près afin de ne pas trop nous enfoncer dans le sable. La vue est splendide et les humains disparaissent au fur et à mesure de notre avancée.
À la fin de la plage, on remonte par une petite forêt en suivant un sentier sabloneux assez abrupt, et Charlotte est très contente de pouvoir compter sur ses bâtons. Découverts sur le West Highland Way, les bâtons sont les jambes qui lui avaient toujours manqué en randonnée.
Nous avons mis environ 1h30 pour faire les deux premiers kilomètres, l’avancée dans le sable le long de Сарайский залив étant assez laborieuse. Il est bientôt temps de s’arrêter pour la première pause repas près de la base d’expédition Otdykha Pervaya. Nous ramassons du petit bois pour alimenter notre réchaud et démarrons notre premier feu. Nous débutons avec notre nouveau réchaud à bois, mais les nouilles instantanées sont faciles à chauffer.
La journée se poursuit en traversant deux autres bourgs.
Dans le premier, Харанцы (Kharansti) le plus gros, on peut se ravitailler en eau minérale (sauf le dimanche… pas de chance pour nous).
Nous y rencontrons un homme qui à notre surprise engage directement la conversation dans un anglais parfait.
C’est un ancien guide, qui loue maintenant une maison sur l’île une partie de l’année. Il s’intéresse à notre itinéraire, nous montre un chemin pour traverser le village sans faire le détour imposé par la route principale, et nous explique que les habitants croient dans le Dieu du ciel bleu (eh oui, à l’année l’île est plus ensoleillée que notre Côte d’Azur !).
Le nom du bourg suivant, Улан-Хушин (Oulan-Khoushin) signifie « force rouge » en bouriate, du fait de la couleur rose-rouge de son sable. 11 km nous en séparent.
Pas d’infrastructures, pas d’agriculture, et pas d’élevage structuré, il n’y a rien sur cette île que des steppes vert-jaune (le climat y est très sec), et le lac Baïkal, immense, de part et d’autre.
Comme nous savons la journée de marche bientôt finie, nous nous accordons une pause chocolat et petit beurre russe dans ce hameau.
Seuls signes de présence humaine : un chien mécontent que nous ayions choisi le banc près de sa maison, et une femme qui taille son herbe à la faux. Benjamin déploie son plus beau russe « могу ли я сфотографировать ? » (puis-je photographier ?). C’est niet. Difficile d’amadouer cette femme après ce premier contact un peu rude.
À la sortie du village, un monument aux morts rappelle l’effort de guerre déterminant des russes durant la seconde guerre mondiale.
Peu de temps après notre stop, nous bifurquons vers la plage pour planter notre tente et nous préparer à affronter la nuit sibérienne.
Benjamin part à la recherche du spot parfait, celui qui sera à la fois abrité, pas trop loin de l’eau, plat, etc. Une fois le lieu choisi, nous ne trainons pas car la nuit tombe vite.
L’Écosse nous a permis de mettre au point une routine bien huilée. Chacun a son rôle à jouer et le connaît. Charlotte a depuis longtemps renoncé à planter les sardines (qui ne sont jamais parfaitement dans l’axe), elle est par contre chargée de l’aménagement intérieur de la tente et de la cuisine (non non non, aucune conclusion à tirer sur un quelconque fonctionnement rétrograde de notre couple !).
Le dîner, chaud, à base de saucisses et pâtes vermicelles est réconfortant (Charlotte), voire délicieux (Benjamin). À la nuit tombée nous transformons notre feu de cuisine en feu de camp et allumons Luci (notre lampe solaire à led gonflable – merci Magui ! ) pour la première fois.
Nous sommes seuls au monde sur cette magnifique plage et apprécions cette quiétude jusqu’à ce qu’un bateau non identifiable dans la nuit noire s’approche de notre position. Charlotte étant peureuse, nous attendrons qu’il soit reparti avant d’aller nous coucher.
À quatre heure du matin, le bateau est revenu : les pêcheurs se couchent tard et se lèvent tôt.
Nous émergeons définitivement à 8h30, et le temps de rallumer le feu pour un café, manger le petit-déjeuner, et finalement tout empaqueter, il est 11h30 ! Nous avons perdu un peu d’efficacité depuis juillet dernier.
Nous atteignons Песчаная (Peshanaya) , dernier hameau sur la côte ouest.
Suit une longue section dans une dense forêt de mélèzes.
La piste, défoncée, est empruntée par de nombreuses camionnettes UAZ (de fabrication russe, initialement destinées à un usage militaire, et principal véhicule motorisé sur l’île : passe partout et faible coût de maintenance), remplies de touristes allant au cap. La forêt s’ouvre régulièrement sur la côte.
Nous arrivons à une intersection où une piste se dirigeant à l’Est se sépare de la piste principale qui continue le long de la côte ouest. Notre préparation approximative, pas franchement aidée par les explications expéditives chez Nikita’s, nous ont fait négligé le ravitaillement en eau. Il nous reste un peu moins de 3 litres à la mi-journée, et il semble bien que le sentier s’élève continuellement au dessus du niveau du lac (ce qui a la réflexion, n’est pas étonnant pour un cap…). L’on est certes toujours entouré d’eau sur cette randonnée mais elle devient inaccessible à mesure de notre progression vers le nord.
À cause de notre paresse matinale, il est de toute façon impossible de rallier le cap aujourd’hui. Nous décidons donc de jouer la prudence en bifurquant à l’Est vers le village Уэуры (Uzuri) , où se trouve une plage de galets. Nous comptons y passer la nuit pour repartir tôt le lendemain vers Khoboy, qui ne sera alors qu’à 9 kilomètres.
Nous croisons beaucoup de camionnettes en sens inverse, rentrant vers Khoujir.
Le village est pittoresque, et l’emplacement de bivouac, royal, abstraction faite des moustiques.
Un troupeau de chevaux déferlent vers 17h pour s’abreuver dans une grande mare. Renseignement pris ultérieurement, il ne s’agit pas de chevaux sauvages, et ils seront rapatriés sur les terres par leur propriétaire pour l’hiver.
Nous prenons de l’eau,
Et posons le bivouac. Même menu que le jour précédent mais cette fois agrémenté de sauce tomate !
Au petit matin, nous sommes réveillés par la pluie. Rien de plus déprimant. Heureusement elle se calme et nous plions bagage. Après avoir ravitaillé en eau (Charlotte qui vivait encore sur nos réserves d’eau en bouteille, est maintenant un peu plus rassurée car Benjamin tourne à l’eau de Baïkal depuis 24 heures, sans problème). Nous sommes sur la piste à 8h10.
Nous atteignons Khoboy à 11h20 juste avant que les premières camionnettes de touristes ne débarquent. Excellent timing !
Nous sommes un peu déçu par le cap, dont la vue est masquée par une sorte de voile. Un jeune homme croisé à Irkoutsk le lendemain nous expliquera que les vents ont rapporté des nuages de fumées issus de feu de forêt plus au nord.
Reste le problème du retour à Khoujir. Il nous faut trouver un véhicule, or il n’y a que des camionnettes de touristes chinois ou russes, et aucune voiture personnelle. Les chauffeurs sont d’une amabilité à vous faire regretter un agent administratif parisien. Certains sont plus gentils mais ne parlent pas le français et sont très occupés à préparer le repas canonique de ce tour organisé : la soupe d’oumoul (le poisson de l’île, que les babushka vendent fumés sur les quais du transsibérien).
Nous commençons à réaliser que ce sera plus dur que prévu. Charlotte repère alors un petit groupe de jeunes filles asiatiques parlant anglais, accompagné d’un guide. Elles sont d’accord pour nous prendre sur le retour. Mais leur chauffeur entend bien nous faire payer. Nous ne discutons pas et apprécions le thé et les petits gâteaux offerts en fin de leur repas.
Les filles sont toutes originaires de Malaisie, et ont organisé un petit périple transsibérien au départ de Pékin. Deux d’entre elles voyagent en première classe !
Nous profitons de la fin de leur tour et des explications du guide sur le Rocher des anges, que nous avons dépassé sans nous y arrêter le matin même.
La légende veut que les couples qui souhaitent avoir un enfant, viennent jeter une pierre depuis l’une des ailes. Celle de gauche pour avoir un garçon et celle de droite pour une fille. Pour que le vœu se réalise il faut entendre le son de la pierre entrant dans l’eau. Nous nous prêtons au jeu chacun d’un côté, mais même en tendant l’oreille nous n’entendons rien !
En revenant en camionnette , nous nous rendons compte du chemin parcouru (c’est toujours impressionnant ! ) et aux nombreux tressautements, qui nous font presque regretter d’avoir accepter précédemment les petits gâteaux, nous sommes contents de ne pas avoir fait comme tout le monde !
La ballade est vraiment jolie et permet de sortir sans grande difficulté des sentiers battus.
Magnifiques paysages et magnifiques photos. Cela donne presque envie de porter vingt kilos sur son dos. Michèle.
Bonjour Michèle,
13 kilos max avec la nourriture au début de la rando. Randonner léger, c’est la clé du plaisir.
Magnifique paysage et magnifique fonctionnement « rétrograde » du couple ! 😉
Ah!! Magui contente de sa petite participation lumineuse. Mais j’aurais eu tres peur dans cette tente « in the middle of fucking nowhere »
La lampe est top ! C’est hyper agréable dans la tente d’avoir Luci pour nous éclairer !
Coucou Charlotte et Benjamin
Matthias va suivre votre périple ! ( avec nous aussi ! Corinne Serge et Marion)
Quel beau voyage ! Et quel courage ! Les photos sont magnifiques
Belle coupe de cheveux pour Charlotte 😉
Nous vous embrassons bien fort
 bientôt les aventuriers !
Matthias Marion Serge et Corinne
Merci beaucoup ! J’espère que tout se passe bien pour Matthias. Ça fait vraiment plaisir d’être suivis!!!
N’hésitez pas à nous donner régulièrement des nouvelles.
Charlotte